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FRANÇOIS VILLON.

les juridictions. A l’effusion de sa reconnaissance envers « Louis, le bon roi de France, » — auquel il souhaite le bonheur de Jacob, la gloire de Salomon, la longévité de Mathusalem, et (ce qui aurait peut-être moins enchanté Louis XII « douze beaux enfants, tous mâles », — il ne mêle l’expression d’aucune autre gratitude. Il semble donc qu’il ait dû sa liberté au roi seul : il avait pu, sachant l’arrivée de Louis à Meun, lui faire tenir une supplique exposant son cas.

Ce n’était pas seulement à l’occasion de leur avènement ou de leurs entrées que les rois accordaient des remises de peine comme celle qu’obtint notre poète. La chancellerie royale expédiait journellement des « lettres de rémission », obtenues par faveur, à la suite de recommandations puissantes et d’ordinaire bien payées. Cet usage, ou plutôt cet abus, — qui rendait toute justice incertaine et permettait souvent aux malfaiteurs les plus dangereux de renouveler vingt fois leurs exploits, — se trouve avoir ouvert à l’histoire des mœurs aux XIVe et XVe siècles une source des plus riches et des plus variées. Les lettres de rémission reproduisent en effet la supplique présentée par celui qui les obtient ou par ceux qui parlent en son nom, et il était de règle que cette supplique exposât dans tous ses détails, — afin qu’on ne pût en contester l’identité, — le délit ou le crime dont on demandait le pardon. Le récit n’était sans doute pas toujours absolument sincère : d’ordinaire il atténuait autant que possible la gravité du fait et de ses conséquences; toutefois il ne s’écartait jamais beaucoup de la vérité, de peur