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FRANÇOIS VILLON.

Et puis preschier les Quinze Signes[1]
Et abatre pain a deux mains…

En revanche, aux « ribauds » qui couchent sous les étaux, et à chacun desquels il a déjà laissé un horion sur l’œil, il assigne une destinée bien diverse et dont il fait un tableau à sa manière :

Trembler a chiere renfrongniee,
Megres, velus et morfondus,
Chausses courtes, robe rongniee,
Gelés, murtris et enfondus[2].

Aux burlesques inventions des legs se mêlent déjà çà et là quelques-uns de ces traits d’observation qui devaient se multiplier quand le poète eut mûri son talent et assuré sa main ; telle ou telle silhouette se dégage déjà avec une frappante et comique netteté : ainsi celle de Robert Valée, ce pauvre clergot au Parlement, qui ressemble à un « poupard », que le Saint Esprit conseille, « bien qu’il soit insensé », et auquel le poète laisse ses braies « pour coiffer plus décemment sa bonne amie », et, en outre, de quoi acheter « une fenêtre », c’est-à-dire une boutique de changeur ou d’écrivain près Saint-Jacques ; — ou celle de ces

Deux povres clercs, parlant latin,
Paisibles enfans, sans estri[3],
Humbles, bien chantans au letri[4],

  1. Les quinze signes qui, d’après une ancienne tradition, devaient précéder le Jugement dernier : sujet fréquent de prédications au moyen âge.
  2. Je n’ai pu faire entrer dans ma classification les trois coups d’étrivières qui sont légués à Moutonnier, ni le legs, au seigneur de Grigny, des châteaux de Bicêtre et de Nijon.
  3. Sans disposition aux querelles, pacifiques.
  4. Lutrin.