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L'ŒUVRE.

prison, le fouet ou la potence qui les attendent. Ces leçons — bien différentes de celles du Testament — eurent peut-être du succès parmi ceux auxquels elles étaient destinées, et c'est sans doute pour eux qu'on jugea bon de les imprimer vingt-cinq ans plus tard ; aujourd'hui elles ne sauraient intéresser que les philologues. On n'y trouve pas une image, pas un mouvement, pas une idée poétique : évidemment le travail matériel de choisir les mots et de les plier, pour la première fois, aux lois du vers a absorbé tout l'effort du rimeur, et il ne lui est pas resté de quoi insuffler à ces créations laborieuses la moindre parcelle de son âme ou de son talent.

Ce n'est pas que l'une eût perdu son ressort et l'autre sa souplesse. Les pièces qu'il écrivit plus tard, à l'occasion du procès où il fut condamné à mort, sont dignes de ses meilleurs morceaux d’autrefois, si elles ne les surpassent pas tous. La ballade des Pendus est avec celle des Dames du temps jadis ce qui reste et restera éternellement vivant de l'œuvre du poète parisien. L'homme et l'artiste nous y émeuvent également. Les sentiments d'humilité, de repentir, de résignation et d'espérance qui remplissent les deux premières strophes sont exprimés avec une simplicité et une intensité qu'on sent venir de l’âme. Et d'autre part la troisième strophe nous présente une peinture d'un réalisme puissant qui saisit les yeux, et qui en même temps fait passer un frisson dans le cœur, quand on pense que c'est sur la vision de son propre cadavre que le poète l'exerce avec cette sûreté de dessin et cette richesse