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FRANÇOIS VILLON.

forma le talent du poète naissant était pauvre et confus. Dans le monde bourgeois et universitaire auquel il appartenait, on avait peu de livres français en dehors du Roman de la Rose, — lecture universelle qui scandalisait les uns et enchantait les autres et qui développait le goût de l’allégorie subtile avec celui de la critique irrévérencieuse, — et des œuvres d’Alain Chartier, qui enseignaient un art distingué, mais factice, et imposaient leur forme à limitation. Les ballades de Deschamps, les poèmes plus récents de Nesson, de Pierre Michaut, de quelques autres, circulaient de main en main et de bouche en bouche. Beaucoup d’écoliers, certainement, s’essayaient à des ballades amoureuses, descriptives, satiriques, qui naissaient et mouraient sans laisser de traces. Villon fit d’abord comme eux, sans avoir d’autres modèles ni de plus hautes visées.

Ses débuts furent, comme il arrive souvent, peu originaux. On peut assigner à cette première période la ballade qu’il composa au nom de Robert d’Estouteville pour être offerte par lui à sa femme Ambroise de Loré. On ne peut rien voir de plus prétentieux et de plus lourd : le style noble ne devait jamais réussir à notre poète. La ballade de Bon Conseil est plus faible encore : on la classerait parmi les moins bonnes d’Eustache Deschamps si l’Envoi ne portait pas en acrostiche le nom de Villon. Elle a cependant un certain intérêt, parce qu’il semble qu’elle reflète les premières impressions de l’écolier, encore honnête, quand il se trouva en contact avec la triste compagnie dont il devait plus tard être un des