Aussi adressai-je, en entrant, mes regards du côté où je devais déposer mes couronnes. Combien j’étais simple ! et quel fut mon étonnement, je dirai presque mon effroi ! Je me représente ce que dut être, il y a quinze ans, la surprise de l’émigré qui en avait passé trente loin de sa patrie, lorsqu’il chercha dans Paris ces jardins spacieux, ces terrains vagues, ces marais verdoyants qu’il avait laissés à son départ, et où des masses d’édifices, des quartiers somptueux s’étaient élevés avec l’éclat et le bruyant étalage de la civilisation moderne. Mon étonnement ne fut pas moindre à l’aspect de cette forêt d’ifs et de monuments funèbres pressés, étagés, entassés dans le cimetière du Père-Lachaise, en si peu d’années. Que d’arbres et d’arbustes ! que de bronze, de marbre, de granit, de pierres de tout genre ! que de grilles de toutes dimensions, de fûts, de colonnes, de pyramides, de statues, de mausolées et de formes sépulcrales ! que d’inscriptions, de noms propres, de titres et d’armoiries ! que de croix, de larmes simulées et d’attributs ! que d’hommes, de femmes et d’enfants, tous inanimés, tous ayant vécu ! Que la mort est féconde ! qu’elle est puissante ! qu’elle frappe vite et que ses coups sont fréquents ! Que de conquêtes, que de richesses, quel empire ! « Non, m’écriai-je, ce n’est plus