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lancelot du lac.

le roi dans dix jours sortira de prison, grâce aux prouesses de votre chevalier. En vous envoyant cet écu à Caradigan, je vous mandai que personne au monde ne savait comme moi le fond de vos pensées et que j’aimais ce que vous aimiez, bien que ma tendresse ne fût pas de la même nature. Aujourd’hui, je vous recommande une chose : aimez avant tout celui qui avant tout vous aime et ne cessera de vous aimer. Hélas ! le monde ne permet pas de vivre sans péché ; votre amour, je le sais, est une folie : mais en vous y abandonnant en faveur du plus digne d’être aimé, de la fleur de toute chevalerie, vous témoignez encore de la grandeur de vos sentiments, de l’excellence de votre raison[1]. Vous avez choisi la fleur de toute chevalerie terrienne. Si vous avez gagné le premier des preux, vous m’avez également gagnée. Mais je ne dois pas demeurer plus longtemps ; entraînée comme je le suis par une force que je ne puis vaincre : la force d’amour. Celui que j’aime ne sait pas où je

  1. « Li pechié dou siecle ne puent estre mené sans folie ; mais moult a grant confort de sa folie qui raison i trueve et honor ; et se vous poez folie trover en vos amors, ceste folie est desor totes autres honorée, car vous aimez la signorie et la flor de tous les chevaliers del monde. »