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la demoiselle de morgain.

je ne crains pas qu’on le sache : l’eussé-je aimé de sensuel amour, je n’en serais pas honteuse et s’il était mort, je consentirais à lui accorder ce que vient d’avancer cette femme, à la condition de lui rendre la vie. »

Ainsi parla la reine, et le roi qui ne semblait pas lui en savoir mauvais gré reprit : « Dame, laissez ce propos : je suis persuadé que Lancelot ne pensa jamais rien de ce qu’on vient de dire. D’ailleurs, il ne pourra jamais rien penser, dire ou faire qui m’empêche d’être son ami. Il est bien vrai que la vilaine action qu’on lui attribuait tout à l’heure serait pour moi grand sujet de douleur ; mais que tous mes hommes le sachent : je voudrais, reine, qu’il vous eût épousée, si tel était votre commun désir, à la seule condition de conserver sa compagnie. » Tout en parlant, il tendit la main à la reine que suffoquaient déjà les larmes et les sanglots. Elle demanda la liberté de sortir, et le roi chargea messire Yvain de la conduire. De son côté, la demoiselle de Morgain s’éloignait en tremblant de peur. Galehaut prit aussitôt congé du roi, en déclarant qu’il ne voulait pas coucher en ville plus d’une nuit avant d’avoir nouvelles de Lancelot. Mais il ne pouvait s’éloigner de la cour sans voir la reine. Il la trouva dans le plus grand désespoir, non de ce qui venait d’arriver,