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lancelot du lac.

celot, n’allez pas vous affliger de pertes terriennes. Il faut laisser les mauvais hommes gémir de la ruine de leurs domaines, parce qu’ils n’ont d’autre valeur que celle de ces domaines. Pour nous, rendons grâces au Seigneur-Dieu qui a bien voulu renverser le château avant que nous y fussions entrés. » Galehaut se prit à sourire : « Beau doux ami, vous attribuez donc mon chagrin à la ruine de ce château : mais eût-il mieux valu que tous les châteaux du monde, sa perte ne m’eût pas causé la moindre peine. Connaissez mieux le fond de mon cœur, et sachez que jamais aucune perte de terre n’a troublé ma sérénité, aucune conquête ne m’a donné la joie que j’attends de votre compagnie. Mais je m’afflige des tourments de cœur que ces ruines me présagent. Or ces tourments ne peuvent être que de vous à moi. Je vis tellement en vous, qu’après votre mort, rien ne pourrait me donner la force de vivre ; et ce n’est pas seulement votre mort que je redoute, mais votre éloignement. Ah ! si la reine votre dame m’avait réellement aimé, elle eût senti qu’il ne fallait pas vous donner à un autre, fût-il le roi Artus. Je ne la blâme pas ; j’aurais dû me souvenir de ce qu’elle me dit un jour : C’est folie de faire largesse de ce dont on ne pourrait se passer. Elle vous a donné au roi,