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les enfances.

vous, dit le maître ; qu’est devenu le vôtre ? — Je l’ai donné. — Et celui-ci, où l’avez vous pris ? — On me l’a donné. — Je n’en crois rien : par la foi que vous devez à ma dame, qu’avez-vous fait ? » — L’enfant, qui n’eût voulu pour rien au monde se parjurer, dit l’échange du roncin, la rencontre du chevalier, le don de son chevreuil. — « Comment, reprend sévèrement le maître, avez-vous pu donner un bon roncin qui n’était pas à vous, et la venaison des forêts de ma dame ? — Ne vous courroucez pas, maître ; ce lévrier vaut deux bons roncins. — Par Sainte Croix ! vous avez agi follement, et pour vous ôter la pensée de recommencer… » Il n’achève pas, mais il lève la main et la laisse lourdement tomber sur l’enfant qu’il abat du cheval. Lancelot se relève, sans jeter un cri, sans faire une plainte. « J’aime pourtant mieux, dit-il, ce lévrier que deux roncins. » Le maître, de plus en plus irrité, saisit une de ces verges flexibles qu’on nomme encore courgie, et en cingle les côtes du pauvre lévrier qui jette de longs cris. Lancelot avait reçu patiemment la buffe de son maître, mais, en voyant frapper son chien, il entre dans une rage furieuse et, s’élançant sur le maître, il le frappe du bois de son arc, au point de lui entr’ouvrir le crâne et d’en faire jaillir le sang. L’arc s’était brisé, il en reprend les tronçons, revient au maître et lui en donne