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lancelot du lac.

beauté du corps ; vous ne trouverez jamais d’enfant ordinairement plus doux et plus débonnaire, bien qu’à l’égard des félons il fût passe-félon. Sa largesse ne connaissait pas de bornes : il donnait bien plus volontiers qu’il ne recevait. Prévenant, affectueux pour les gentils hommes, il témoignait une bienveillance naturelle pour tous ceux qu’il n’avait pas de bonnes raisons de mépriser. Il savait discerner les choses et les hommes ; il voyait juste, et cette sûreté de sens lui faisait tenir à ce qu’il avait une fois entrepris, en dépit de tout ce qu’on pouvait dire pour l’en détourner.

Un jour il était allé en chasse à la poursuite d’un chevreuil : il dépassa bientôt ceux qui l’accompagnaient. Le maître voulut le rejoindre, mais son cheval trop pressé des éperons finit par le jeter à terre. Lancelot cependant chevauche à travers bois, atteint le chevreuil et le perce d’une flèche, au passage d’une voie ferrée. Puis il descend, lève le gibier en trousse et remonte, tenant sur le devant de la selle le brachet qui l’avait conduit sur les pistes. Comme il revenait sur ses pas et vers ses compagnons, il fait rencontre d’un valet marchant à pied et tenant en laisse un roncin épuisé de lassitude. C’était un jouvenceau de prime barbe, le bliaud serré dans la ceinture, le chaperon rejeté sur l’épaule, les éperons rougis du sang de son cheval.