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lancelot du lac.

grande douleur que vous ayez eue jusqu’à présent. — Voilà, répond la reine, de bonnes raisons de le conserver ; bonne aventure à qui l’envoie ! mais ne pourrai-je savoir quelle est cette sage demoiselle ? — Madame, elle se nomme la Dame du lac. » La reine savait déjà combien elle devait à sa protection : elle embrasse la messagère, lui ôte de ses propres mains l’écu qu’elle regarde avec une inquiète attention. Il était fendu de la pointe au chef, la boucle seule en retenait les deux parties, entre lesquelles on pouvait aisément passer la main. Sur l’une était figuré un chevalier armé, sauf la tête ; sur l’autre, une dame qu’on eût crue vivante, tant elle était bien peinte, approchait son visage de l’autre visage, et leurs joues se seraient touchées sans la fente qui les éloignait l’une de l’autre.

« Il n’y aurait qu’à louer dans cet écu, dit la reine, si les deux tranches n’en étaient pas séparées ; et cependant, il paraît avoir été fait nouvellement. Veuillez nous dire, demoiselle, la raison de cette brisure[1], et quel est ce che-

  1. Il se peut que la brisure, dans le blason, ait tiré sa raison d’être de ce passage du Lancelot. Elle devait indiquer la distinction des branches puînées, et disparaissait quand le droit ouvert de succession donnait à celui qui l’avait prise la primogéniture. C’est ainsi que la branche de Bourbon-Orléans porte encore la brisure du lambel.