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JUGEMENT.

pardonne à la mienne ; mais afin de satisfaire le peuple, tu me diras le véritable nom de ton père. »

Merlin répondit : « Je confesserai librement ce que je n’aurais pas dit de force. Je suis né d’un ennemi qui engigna ma mère. Cet ordre d’ennemis se nomme Incubes ; ils habitent les régions de l’air, et Dieu leur permet de connaître les choses et les paroles passées. C’est par lui que j’ai su le secret de ma naissance. Mais Notre-Seigneur, en raison de la bonté de ma mère, de son repentir et de sa pénitence, m’a donné la faculté de connaître l’avenir ; je vais t’en donner la preuve. » Tirant alors le juge à l’écart : « Ta mère, en sortant d’ici, ira trouver celui qui t’a engendré. Elle lui apprendra ce que je t’ai découvert ; le prouvaire aussitôt sentira une telle peur de ta vengeance qu’il se laissera conduire par le démon à une rivière dans laquelle il se noiera. »

Le chose arriva telle que Merlin l’avait annoncée. Le juge déclara au peuple que la mère avait été justifiée par son fils, l’enfant le plus sage qu’on eût jamais vu. Le peuple se retira satisfait, et Merlin, prenant congé du juge, le pria de raconter tout ce qui venait de se passer au prud’homme qui avait conseillé sa mère. Il se nommait Blaise, et ce fut lui que Merlin