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LE GÉANT DU MONT SAINT-MICHEL.

Il éteint sur mon corps ses feux Impurs, et Dieu sait avec quelle répugnance je me soumets à ces cruelles épreuves. Hélas ! il ne s’éloigne jamais sans m’avoir meurtrie, ensanglantée. Voyez sur la montagne voisine un grand feu : c’est là qu’il est en ce moment, mais il ne peut tarder à venir. Éloignez-vous, au nom du ciel, et laissez-moi à mon deuil et à ma mauvaise fortune. »

Beduer prit cette femme en grande pitié et la réconforta de son mieux, avant de retourner vers le roi, pour lui apprendre que le géant était sur l’autre montagne. Artus, profitant du rapide reflux de la mer, avança de ce côté et se prit à gravir. Il avertit ses compagnons de demeurer à quelque distance sans le perdre de vue, pour emporter son corps si le géant restait vainqueur.

Puis, l’épée dressée au poing, l’écu devant la poitrine, il s’avança, et se trouva bientôt à portée du géant, lequel, accroupi devant le feu, rôtissait une forte pièce de chair embrochée dans un bois de lance. Il entaillait les morceaux les mieux cuits et les dévorait avec une sorte de rage. Au bruit des pas du roi, il tourne la tête, et, voyant approcher un homme armé, il saute en pieds, laisse le feu, court prendre un jeune tronc de chêne qui lui servait de massue et que deux hommes auraient eu grand’peine à sou-