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LE ROI ARTUS.

la vôtre ? — Oui, ma dame, » fait Merlin, « oui, sans aucun doute. Que souhaitez-vous ? — Un réduit plaisant et délicieux, impénétrable, invisible à tous les autres, où nous pourrons séjourner vous et moi, nuit et jour, en joie et en déduit. – Il m’est aisé de le faire, » dit Merlin. « Non pas vous, » reprit Viviane, « il suffit que vous m’en appreniez le secret : je veux de votre part une confiance sans bornes. — J’y consens donc. » Alors il lui enseigna le jeu, et elle le mit en écrit.

Ils demeurèrent ainsi quelque temps ensemble, en se prodiguant tous les témoignages d’amour ; « tant qu’il lor avint un jor qu’il s’aloient deduisant main à main par la forest de Briosque ; si trouverent un buisson d’aubes espines, haut et bel, tout charchié de flors. Il s’assistrent dessouz et se jouerent et solacierent en l’ombre. Lors Merlins mit son chief au giron de la damoiselle. Elle commença le chief à lui testonner, si qu’il s’endormi. Et quant la damoiselle senti qu’il dormoit, elle se dreça doucement et fist un cerne de sa guimple entor le buisson et entor Merlin, et comença ses enchantemens, tels que il méismes li avoit apris. Elle fist par neuf fois le cerne, puis s’en ala seoir devant li et li remist le chief en son giron, et le tint iluec longuement, tant qu’il s’esveilla. Lors