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LA FAMILLE DU PRUD’HOMME.

Il y avait au pays un prud’homme, auquel on apprit ce qui se disait partout de cette aventure. Il alla trouver les deux autres sœurs pour les conforter et leur demander comment tant de malheurs leur étaient arrivés : « Nous ne savons, » dirent-elles, « sinon que Dieu nous a pris en haine. — Ne parlez jamais ainsi, répondit le prud’homme ; vous n’avez rien perdu de par Dieu ; Dieu gémit au contraire quand il voit le pécheur se haïr lui-même. Tout vous est advenu de par l’Ennemi. Mais étiez-vous informées de la mauvaise vie de votre sœur ? — Oh ! non assurément. — Gardez-vous donc de faire comme elle, car le mal vient du malfaire, et le bien du bienfaire. C’est saint Augustin qui l’a dit. »

Ainsi les enseigna le prud’homme. L’aînée l’écoutait avec attention et n’oubliait rien de ses paroles. Il leur apprit sa croyance, comment elles devaient prier Dieu, craindre, adorer et servir Jésus-Christ. « Si vous retenez bien mes conseils, » leur dit-il, « vous en tirerez grand profit, l’Ennemi n’aura pas sur vous de pouvoir. Vous serez mes filles en Dieu ; je pourvoirai à vos besoins ; quand vous aurez un conseil à demander, ma maison n’est pas éloignée, venez à moi, vous ferez que sage. »

Le démon voyait avec chagrin les deux filles prêtes à lui échapper ; et comme il n’espérait