Page:Paris, Paulin - Romans de la Table Ronde, tome 2.djvu/113

Cette page a été validée par deux contributeurs.
107
CONCEPTION DE MORDRET.

lit d’Artus était posé devant l’huis de la chambre du roi, comme il convient à l’écuyer de service. Il était beau valet et subtil ; il ne tarda pas à remarquer la beauté, l’agréable et frais embonpoint de la reine et en devint amoureux. La dame ne s’en donnait garde, tous ses sentiments allant au roi. Un jour les barons eurent à tenir un conseil de nuit. Loth avertit les écuyers de mettre les selles, à la chute du jour, et de n’en parler à personne. À minuit, le roi se lève doucement sans éveiller la reine, demeurée seule avec une jeune fille couchée de l’autre côté de la chambre.

Dès que Loth fut sorti de l’hôtel, Artus, qui de tout s’était donné garde, s’en va au lit de la reine, se glisse sous les draps, mais sans oser d’abord faire autre chose que de tourner et retourner. La dame s’éveilla d’elle-même, et, comme femme épousée qui se croit auprès de son mari, lui jeta les bras autour du corps et le serra, demi-endormie, contre elle. Artus lui rendit son étreinte et prit d’elle son plaisir. Puis, quand la dame fut rendormie, il revint doucement à son lit. La reine n’aurait jamais eu le moindre soupçon de l’aventure, sans le jeune écuyer qui le lui fit entendre le lendemain, comme il taillait au dîner devant elle. La reine le voyant à genoux : « Sire damoisel, » lui dit-elle, « levez-vous, c’est assez vous incli-