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TRANSITION.

avait faite Robert de Boron ; ils y ont substitué le livre d’Artus, qu’ils se contentèrent de raccorder, tant bien que mal, au livre de Merlin pour en devenir la continuation.

Ainsi le livre qu’on appelle aujourd’hui le roman de Merlin contient deux parties distinctes. La première, qui seule doit conserver le nom de Merlin, est l’œuvre réduite en prose de Robert de Boron. La seconde, dont le vrai nom est le Roman d’Artus, sort d’une main anonyme, peut-être la même à laquelle on devait déjà le Saint-Graal.

J’ai si longtemps hésité avant de m’arrêter à ces conclusions, qu’on me pardonnera peut-être d’y revenir à plusieurs reprises, comme pour mieux affirmer le résultat de mes recherches successives. Je n’ai pas dissipé tous les nuages, éclairci toutes les obscurités ; mais ce que j’ai découvert, je crois l’avoir bien vu ; et si je ne me suis pas trompé, c’est un pas de plus fait sur le terrain de nos origines littéraires.

Le magnifique début du Merlin se lie à l’ensemble de la tradition et des croyances bretonnes. Pour justifier l’autorité des prophéties attribuées à ce personnage, il fallait reconnaître à leur auteur une nature et des facultés supérieures à la nature et aux facultés des autres hommes. On n’osa pas mettre Merlin en commerce direct avec Dieu, et le placer sur la