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LE SAINT-GRAAL.

ne plaise, » dit-il, « que cette bonne épée soit ressoudée, sinon par celui qui doit accomplir l’aventure du siége périlleux de la Table-Ronde, au temps du roi Artus ; et que la pointe cesse de saigner avant que les deux parties ne soient rejointes. »

Après avoir ainsi destiné cette épée, Josephe établit des prêtres dans la contrée, pour y faire le service divin dans une nouvelle église qu’il dédia à Notre-Dame. Là fut déposée l’épée dans un bel écrin ; là fut aussi mis en terre le frère de Matagran qui ne vécut pas au-delà de huit jours après sa résurrection[1]. Josephe alors retourna vers ses compagnons, arrêtés sur la rivière de Colice, et leur raconta toutes les merveilles que Dieu venait d’opérer par son ministère.

Cette rivière de Colice tombait dans un bras de mer et portait de grands vaisseaux. Elle traversait la forêt de Brocéliande et fermait la voie devant eux. Comment la traverser ? « Vous avez, » dit Josephe, « passé de plus grandes eaux. Mettez-vous en prières, et le Seigneur viendra à notre aide. » Ils se jetèrent à genoux, le visage tourné vers l’Orient. Bientôt

  1. Mais, avant de mourir, « Matagran fist mettre en escrit toutes les paroles que Josephe destinoit de l’espée ; et par ce furent-eles sceues d’oir en oir, et sont encoires jusc’à jourd’ui. » (Ms. 2453, fo 313.)