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HISTOIRE D’IPOCRAS.

chelier, le teint brun et amoureux, agréable en paroles, et toujours vêtu de belles robes. Il but et mangea beaucoup au souper, il fut plus avenant, mieux parlant que jamais, comme celui qui comptait avoir bientôt joie et liesse de sa mie. Au sortir de table, l’empereur annonça qu’il irait le lendemain chasser avant le point du jour, et se retira de bonne heure, tandis qu’Ipocras passa chez les dames pour converser et s’ébatre avec elles jusqu’au moment où chacun prit congé pour aller reposer. Minuit arriva : quand tout le monde fut endormi du premier sommeil, Ipocras se leva, se chaussa, se vêtit et s’en vint doucement au corbillon. La dame et sa demoiselle étaient en aguet à leur fenêtre : elles tirèrent la corde jusqu’à la hauteur de la chambre où Ipocras pensait entrer ; puis elles continuèrent à tirer, si bien que le corbillon s’éleva plus de deux lances au-dessus de leur fenêtre. Alors elles attachèrent la corde à un crochet enfoncé dans la tour, et crièrent : « Tenez-vous en joie, Ipocras, ainsi doit-on mener les musards tels que vous. »

Or ce corbillon n’était pas là pour transporter les denrées au fils du roi de Babylone : il servait à exposer les malfaiteurs avant d’en faire justice, comme les piloris établis aujourd’hui dans les bonnes villes. On peut ju-