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LE SAINT-GRAAL.

l’empereur, « vous auriez bien pu, sauf votre grâce, vous dispenser de dresser ces images : je n’en vaudrai pas mieux pour elles. Elles ont coûté grand, et peu valent. Mon véritable gain, c’est votre amour que j’ai conquis. Et, comme dit la vieille sentence : Qui à prud’homme s’accompagne est assez payé de son service. »

Dans le temps qu’Ipocras était en si grand honneur à Rome, une dame, née des parties de Gaule, vint séjourner dans cette noble ville. Elle était d’une grande beauté ; tout annonçait en elle une naissance illustre. Elle serait venue pour épouser l’empereur, qu’elle n’eût pas porté des vêtements plus riches et mieux assortis à sa personne. L’empereur, en la voyant si belle, voulut qu’elle fût de son hôtel, qu’elle prît de ses viandes. On lui donna pour elle seule une chambre, et des dames et demoiselles pour lui faire compagnie. Elle vivait déjà depuis quelque temps à Rome, quand un jour l’empereur, Ipocras et quelques autres chevaliers de la cour s’arrêtèrent devant sa chambre. Dès qu’elle les entendit parler, elle entr’ouvrit sa porte, et les rayons du soleil, qui frappaient alors sur l’or dont les deux images étaient décorées, vinrent retomber sur son visage et l’éblouirent au point de l’empêcher de voir l’empereur. À quelques moments de là, voulant savoir ce qui