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Ainsi les harpeurs bretons, gallois, écossais et irlandais admettaient dans leur répertoire des récits venus, plus ou moins directement, de la Grèce ou de l’Italie ; précieux débris échappés au naufrage des souvenirs antiques. Seulement les lais, étant dits de mémoire et non écrits, offraient le mélange des traditions de tous les temps, et devenaient l’occasion naturelle des confusions les plus multipliées. Dans nos romans de la Table ronde nous n’aurons pas de peine à reconnaître de fréquents emprunts faits aux légendes d’Hercule, d’Œdipe et de Thésée ; aux métamorphoses d’Ovide et d’Apulée : et nous n’en ferons pas honneur à l’érudition personnelle des romanciers, pour avoir droit de contester l’ancienneté des lais : car plusieurs de ces récits mythologiques devaient être depuis longtemps la propriété de la menestraudie bretonne.

De tous les peuples de l’Europe, cette race bretonne avait été dans la position la plus favorable pour conserver et son idiome primitif, et les traditions les moins brisées. Les Bretons insulaires, devenus la proie des Anglo-Saxons, s’étaient renfermés dans une morne soumission, mais n’avaient jamais pu ni voulu se plier aux habitudes des conquérants. Ils furent, dans le pays de Galles, comme les Juifs dans le monde entier ; ils gardèrent leur foi, leurs espérances,