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fectaient une forme de versification déterminée, et se soumettaient à des mélodies distinctes qui demandaient le concours de la voix et d’un instrument de musique. L’accord de la voix aux instruments avait assurément un charme particulier pour nos ancêtres car, lorsqu’on parle des jongleurs bretons dans nos plus anciens poëmes français, c’est pour y rendre hommage à la douceur de leurs chants comme à l’intérêt de leurs récits. Mon savant ami, M. Ferdinand Wolf, dont l’Europe entière regrette la perte récente, a trop bien étudié tout ce qui se rapportait aux lais bretons, pour que j’aie besoin aujourd’hui de démontrer leur importance et leur ancienne célébrité : je me contenterai de rassembler un certain nombre de passages qui pourront servir à mieux justifier ou à compléter ses excellentes recherches. Et d’abord, nous avons d’assez bonnes raisons de conjecturer que la forme des lais réclamait, même fort anciennement, douze doubles couplets de mesures distinctes. Le trouvère français Renaut, traducteur du très-ancien lai d’Ignaurès, suppose qu’en mémoire des douze dames qui refusèrent toute nourriture, après avoir été servies du cœur de leur ami[1],

  1. Les deux lais d’Ignaurès et de Guiron ont été les modèles du beau roman du Chastelain de Coucy, écrit au commencement du quatorzième siècle.