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INTRODUCTION.

raison d’être étonné qu’un Français du comté de Montbelliart ait, le premier, révélé au continent l’existence d’une légende gallo-bretonne. Mais que savons-nous si Robert de Boron n’avait pas séjourné en Angleterre, ou si, dans un temps où les villes et les châteaux étaient le rendez-vous des jongleurs de tous les pays, quelqu’un de ces pèlerins de la gaie science ne lui avait pas raconté le fond de cette tradition religieuse ? En tout cas, nous ne pouvons récuser son propre témoignage ; Robert s’est nommé, et il a nommé le chevalier auquel il soumettait son œuvre. Après avoir conté comment Joseph remit le vase qu’il nomme le Graal aux mains de Bron, comment étaient partis vers l’Occident Alain et Petrus : « Il me faudrait, » ajoute-t-il, « suivre Alain et Petrus dans les contrées où ils abordèrent, et joindre à leur histoire celle de Moïse précipité dans un abîme ; mais

Que nus hons nes puet Je bien croi
Que nus hons nes puet rassembler,
S’il n’a avant oï conter
Dou Graal la plus grant estoire[1],
Sans doute qui est toute voire.
A ce tens que je la retreis,
O mon seigneur Gautier en peis,

  1. La suite des histoires de Petrus, d’Alain et de Moïse, se retrouve en effet dans le roman en prose du Saint-Graal.