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pieux, à la toupie, à la potée de noix, et à vingt autres jeux que la tradition puérile a sans doute également conservés et que les changements de nom ne permettent plus de reconnoître.

Mais il fallut bientôt laisser là tous ces premiers et charmants plaisirs, pour commencer de sérieuses estudes :

Car on me fist latin apprendre,
Et se je varioie au rendre
Mes liçons, j’estoie batus.

En revanche, ce que le maître lui donnoit, il ne tardoit guère à le rendre aux autres :

Non pourquant en sus de mon maistre,
Je ne pooie à respos estre ;
Car aux enfans me combatoie,
J’ere batus et je batoie ;
Lors estoie si desréés
Que souvent mes dras deschirés
Je m’en retournoie en maison.
Là estoie mis à raison,
Mais pour ce jà mains n’en feisse.

Cette passion des bruyants exercices n’empéchoit pas le jouvenceau de se complaire à la lecture des récits d’aventure et d’amour. Mais hâtons-nous de le dire : le joli mot d’amour avoit, de son temps, une acception bien plus étendue que du nôtre. Ce n’étoit pas précisément le sentiment dont il est peu de personnes, même ici, qui n’ait au moins entendu parler ; mais tout ce qui rentroit dans le domaine du savoir-vivre et de la courtoisie. Être amoureux, c’étoit être aimable, avoir le goût du monde et de tous les honnêtes plaisirs, tels que le chant, les vers, les entretiens agréables, les bonnes façons de paroître dans les tournois, dans les concours poétiques, dans les réunions polies. Voilà comment la première loi du savoir-vivre recommandée aux jeunes gens, aux bacheliers, étoit