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responsabilité retombe sur Graindor. Lui-même avait pris soin de nous avertir que les nouveaux jongleurs négligeaient de réciter le vrai commencement de la chanson, mais qu’il se garderait de l’oublier. Et cet avertissement suffirait pour trahir chez le rénovateur l’intention de raconter à sa manière la croisade de Pierre l’Ermite. »

Le point maintenant reconnu, on me dispensera d’appuyer sur cette première concordance. Seulement je profiterai de l’occasion pour rappeler que la véritable Chanson de Richard commence dans le texte que j’en ai publié, au trente-quatrième couplet :

Seignor or faites pais, que Dieu vous béneïe !
Ce fu un jour de mai que chascuns oisiaus crie,
Que li rossignol chante, et la merle et la pie,
Et l’aloe s’en voise en l’air à vois serie[1].

2. La concordance recommence et le texte original reparaît [2] au moment du départ des Croisés pour Constantinople. Mais on chercherait vainement les détails si intéressants que l’auteur de version anonyme et Albert d’Aix donnent sur la marche des différents corps d’armée à travers l’Allemagne, la Hongrie, la Bulgarie et l’Empire grec.

« On y chercherait en vain » non-seulement « les détails, » mais l’indice de cette marche, par la raison que Richard ayant suivi la route d’Italie, n’avait rien su ni voulu dire de ceux qui avaient suivi la route d’Allemagne.

3. Le trouvère, impatient sans doute d’arriver à son véritable sujet, conduit les Croisés jusqu’à Constantinople en trois vers.

Non pas en « trois » mais en huit vers que voici :

Li baron et li prince lor ost ont assenblées ;
De vitaille et de vivres ont les males torsées ;

  1. Vers charmant. — L’édition n’aurait pas dû faire deux mots de s’en voise ; c’est le présent du verbe s’envoiser, s’éjouir.
  2. Il fallait lire : commence et paraît.