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bien d’autres encore, comment un trouvère aurait-il négligé de s’en emparer s’il les eût connus ?

Voilà déjà un certain nombre de rectifications de faits et de dates qui réduisent de beaucoup la valeur des arguments de M. Pigeonneau. Pour informer contre le caractère original de la Chanson d’Antioche, le savant professeur allègue de nombreux anachronismes, des allusions à des ouvrages composés plus tard, le peu d’exactitude des indications locales, enfin l’absence de tout indice qui permette de supposer la présence de Richard au milieu des Croisés. Reprenons chacun de ces arguments tels que M. Pigeonneau va les énumérer en se plaçant, un instant, à mon point de vue.

1. Supposons, comme le veut M. P. P., qu’il faille attribuer aux rénovateurs les erreurs et les anachronismes qui ne manquent pas dans la Chanson d’Antioche.

Je n’ai supposé nulle part qu’on pût attribuer aux rénovateurs les erreurs et les anachronismes de la Chanson. Ces méprises sont bien de Richard, mais se rapportent uniquement à la date inexacte de l’assemblée de Clermont et à la présence du roi de France dans cette assemblée. La double erreur est tellement forte qu’il faut en conclure que Richard dut composer sa chanson loin de la France. S’il avait pu consulter une seule des chroniques publiées avant lui, ou s’il eût encore été dans son pays de Flandres, il aurait lu, ou chacun lui eût dit que l’assemblée s’était tenue au mois de novembre et que le roi Philippe n’y avait pas assisté. Or, autant qu’il m’en souvienne, ces deux anachronismes sont les seuls qu’on puisse relever dans la Chanson d’Antioche.

2. Supposons encore qu’il faille attribuer au rénovateur les fréquentes allusions aux romans du cycle carlovingien et du cycle d’Alexandre, qui n’existaient pas à la fin du onzième siècle.

Ici le docte professeur commet à son tour une furieuse

    douin, Godefroi arrivant dans cette même ville de Tarse n’y avait trouvé que Bohemond au lieu de ce pirate Gillemer, dont Guillaume de Tyr n’a parlé que d’après Albert.