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liques de la Passion, en leur préparant une demeure aussi somptueuse, le roi nourrissait l’espérance de mettre sous leur sauvegarde le cœur qui les avait honorées d’une dévotion si singulière.

Et, comme sa piété n’était égalée que par son humilité, je crois qu’il aura lui-même exprimé à son fils le désir d’être là secrètement caché ; que surtout il l’aura conjuré de ne pas donner à son pauvre cœur une enveloppe riche ou somptueuse. Que lui importait la gloire et les vains souvenirs du monde ? qu’importait même une inscription ? Le Sauveur des hommes, tous les jours présent dans le sacrifice de l’autel, en aurait-il besoin pour le reconnaître ? Louis avait donc pu recommander jusqu’à l’omission d’une épitaphe. « Ad laudem humilitatis ejus (dit Geoffroi de Beaulieu, dans un des premiers chapitres) spectat quod in extrema voluntate sua statuit et in testamento suo scribi præcepit quod super sepulturam ipsius defuncti nulla curiositas, nulla superfluitas fieret : ut sicut humilitatis exemplum se exhibuit vivus, ostenderet et defunctus. » Paroles remarquables, si l’on se souvient qu’en 1272, et vingt-cinq ans avant la canonisation, un somptueux mausolée fut érigé à Louis IX par l’ordre de Matthieu de Vendosme. De sorte qu’il faudrait accuser Philippe-le-Hardi d’avoir, comme l’abbé de Saint-Denis, violé les recommandations bien connues de son père, si l’humble caisse déposée sous l’autel de la Sainte-Chapelle, ne venait aujourd’hui prouver qu’il les avait respectées.

D’ailleurs, il est aisé de comprendre comment, à l’époque de la canonisation, personne n’aura songé à tirer cette caisse de la place de prédilection qui lui avait été assignée. Pourquoi l’arracher d’une place aussi désirable pour un saint que pour un roi ? Était-ce un moyen de mieux honorer la mémoire de saint Louis que de violer sa volonté dernière ? et pouvait-on attendre de la châsse qu’on lui eût consacrée des miracles comparables à ceux que la foi devait demander avec confiance aux saintes reliques de la Passion ? Ainsi, la Sainte-Chapelle n’ayant pas eu d’historiens dans ce temps-là, les générations oublièrent bientôt ce qu’était devenu le cœur de saint Louis ; et, comme nous l’avons remarqué, il en fut de même de celui de