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menses prérogatives que sous les règnes de saint Louis, de Philippe-le-Hardi et de Philippe-le-Bel. Depuis un temps immémorial, elle avait le droit d’ensevelir les rois de France ; depuis plusieurs siècles, ses reliques avaient le privilége d’exciter la ferveur universelle et d’attirer les pèlerins de toute l’Europe. Tel avait même été le concours des fidèles, qu’il avait fallu le soumettre à des règles et lui assigner des limites. C’est pour cela qu’on avait institué la fameuse foire du Landit, devenue bientôt le rendez-vous de tous les marchands, de tous les pénitents, de tous les malades. Mais la fondation de la Sainte-Chapelle, le motif de cette érection somptueuse pris dans le désir de loger convenablement les reliques de la Passion nouvellement arrivées de Constantinople, la prédilection ardente de saint Louis pour le chant et le service de ses chapelains, tout devait nécessairement éveiller l’inquiétude de l’abbé de Saint-Denis. Qu’allait devenir la confiance des fidèles dans les mérites de l’Aréopagite, quand à Paris la prière pouvait s’élever jusqu’au ciel du pied de la vraie croix et en présence de la sainte couronne d’épines ? La ferveur allait donc nécessairement changer de direction et l’avenir de l’abbaye allait en être compromis.

Quand les anciennes prérogatives d’un corps sont menacées, on doit s’attendre à de vives résistances. Ce fut alors, en effet, que les religieux de Saint-Denis, rassemblant toute leur énergie, affectèrent des prétentions imaginaires pour remplacer le crédit réel qu’on voulait leur enlever. Matthieu de Vendosme gouvernait l’abbaye : c’était un prélat dont les éminentes qualités n’avaient pas échappé à saint Louis. Grand homme d’État, il ne préférait à l’intérêt public qu’un seul intérêt, celui de Saint-Denis ; le roi, partant pour l’Afrique, l’avait choisi pour régent du royaume, au détriment de la reine Marguerite, son épouse bien-aimée. Quand le corps du roi défunt fut, en 1271, présenté par le pieux Philippe devant l’église de Saint-Denis, Matthieu de Vendosme refusa d’en ouvrir les portes, pour avoir remarqué dans le cortége deux évêques revêtus d’habits pontificaux. Ce n’était pas le moment de contester : les deux évêques consentirent à déposer leurs vêtements sacrés, et les os de Louis IX purent franchir le porche de l’église.

La conduite de Matthieu de Vendosme, à la mort de Phi-