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nonam, anno Domini millesimo ducentesimo septuagesimo. »

À partir du quarante-troisième chapitre, l’intention et le style de notre auteur changent visiblement. Au lieu de nous raconter des faits secrets, intimes, on aborde les événements publics, et on le fait en termes qui doivent accuser une rédaction moins ancienne. Ainsi, dans les chapitres précédents, Louis IX n’est guère autrement qualifié que dominus rex, rex catholicus, sanctus, devotus, et surtout pius : mais avec le quarante-cinquième, dans lequel on annonce l’arrivée de Charles d’Anjou à Tunis, l’épithète nouvelle de beatus rex cesse d’être en harmonie avec les sentiments que Geoffroi de Beaulieu, écrivant au pape, devait exprimer en 1272.

Dans le chapitre quarante-sixième, on parle des ossa sacra et des sacras reliquias.

Le quarante-septième chapitre contient le fameux passage, fondement unique de l’opinion de M. Letronne. On y trouve aussi les sanctas reliquias, et de plus une circonstance qui nous paraît inexplicable. « Quand nous revînmes en Sicile au retour de Tunis, » fait-on dire à Geoffroi de Beaulieu, « nous visitâmes l’abbaye dans laquelle étaient déposées les saintes reliques, et l’on nous donna l’assurance qu’un grand nombre de miracles s’étaient opérés par leur intercession. » S’il est un fait incontestable, c’est le prompt retour en France de Geoffroi de Beaulieu. Il partit de Tunis le 12 septembre, accompagné de Guillaume de Chartres et de plusieurs autres, avec l’honorable mission de remettre aux régents du royaume le scel dont le nouveau souverain voulait qu’ils se servissent. On les avait en même temps chargés des lettres par lesquelles Philippe annonçait aux régents et aux grands vassaux la triste nouvelle de la mort de son père, et réclamait des envois d’argent. D’Achery les a publiées dans le Spicilége, et nous y voyons la preuve frappante de la diligence que dut mettre Geoffroi de Beaulieu à toucher les côtes de France. Comment donc aurait-il eu le loisir de passer, de s’arrêter en Sicile ? Comment n’y serait-il arrivé qu’après la pompe solennelle des obsèques du roi, réglée par Charles d’Anjou ? Tout cela est inexplicable. Car, de deux choses l’une : ou il aborda en Sicile sur le vaisseau qui portait les entrailles du roi, ou il traversa ces parages avant l’arrivée du bâtiment. Cette partie du récit est donc parfaitement con-