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logies et des contrastes dans les autres ouvrages du même genre. Vous verrez qu’elle se recommande par la vigueur du style, par la variété des caractères et par l’intérêt du récit. Dans les armées que les Gestes mettent tant de fois en mouvement, on formoit au milieu des rangs un échafaud sur lequel on élevoit l’étendard ; c’étoit de là qu’on s’ébranloit et là qu’on devoit revenir. L’étendard suivoit toutes les ondulations de la bataille ; il avançoit, il rétrogradoit, mais toujours autour d’un bataillon formidable. De ce point, le chef donnoit des ordres, envoyoit des renforts, fortifioit les côtés faibles et pourvoyoit à tous les incidents inattendus. S’il arrivoit que l’étendard fût renversé, tout alors étoit abandonné, c’étoit le signal du sauve qui peut. Eh bien, Messieurs, Raoul de Cambrai sera notre étendard, dans la première campagne de cette année. Je vous en présenterai l’analyse rapide ; puis j’en étudierai avec vous toutes les parties, dans lesquelles semblent jouer tous les ressorts de la poésie épique : le roi, la duchesse, la mère, la religieuse, la fiancée, le baron féodal, le chevalier errant ou de fortune, le messager, l’évêque et le bourgeois. Nous ne pouvions trouver pour nos excursions à travers les Chansons de geste un meilleur point de repère, et tout ce que nous devons souhaiter, c’est qu’un bataillon d’auditeurs attentifs et surtout bienveillants reste fidèle autour de notre étendard.


PAULIN PARIS.


(Extrait du Bulletin du Bibliophile, mars 1859.)