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XXXVI
INTRODUCTION.

innocence à préserver et quelques honnêtes gens à prémunir ? Il faut lire, un peu partout dans ce théâtre, les aveux de vingt malheureuses femmes, — dont M. Alexandre Dumas fils a ausculté le cœur palpitant et quelquefois disséqué les organes avec le rude sang-froid d’un anicien, — pour tressaillir et frémir d’aise ou de douleur, pour être pénétré d’un sens de la vie, qui défie et rehausse ces misères de la réalité. Et ainsi, nul écrivain dramatique n’a été un réaliste plus audacieux, ni un positiviste plus décidé ; mais nul aussi n’a plus puissamment asservi les faits aux lois d’une vérité supérieure, qui est œuvre d’imagination, de sympathie et d’art.

A force de tourner l’écueil, il a donné à d’autres la tentation de s’en jouer ou de s’y heurter.

De cette âpre dérision de nos vices et de nos illogismes sociaux est né l’adroit et spirituel dilettantisme qui rit de tout sans la moindre envie d’en pleurer. Ou, s’il pleure, c’est par accident, pour n’avoir point l’air de manquer de cœur, et d’ailleurs avec une certaine gaucherie qui trahit l’inexpérience. « Froufrou !… Pauvre Froufrou !… » L’ironie gaie adultère l’émotion ; et morose, la tarit.

Un observateur d’une pénétration égale à celle de M. Alexandre Dumas, sinon de pareille envergure, et qui était tenté de poursuivre le positivisme plus loin encore, devait fatalement dépasser les extrêmes limites, que son glorieux prédécesseur avait souvent reculées, et, pour