louables appétences. « Si le goût du positif, écrivait J.-J. Weîss en 1858, ne renaissait dans les esprits que pour en bannir les illusions dangereuses, pour y ramener avec le sentiment des réalités sévères de la vie, le respect des devoirs qu’elle impose, nous nous applaudirions sans réserve qu’on devienne chaque jour plus positif[1]. » Mais l’austère idéal est dépassé. Les faits seuls se cristallisent et fascinent les regards. La loi, qui fait office des principes, fait aussi illusion à la conscience et la dépossède gravement. La fortune, qui est la première des réalités, devient un devoir ; elle est presque le devoir. L’argent n’est plus seulement un moyen, dès que l’assouvissement est une fin. La morale est ébranlée par une cohue de contre-vérités de fait, à la tête desquelles se dresse la jouissance égoïste et sceptique. Le bonheur est au plus habile, qui s’enrichira, au plus malin, qui tournera le Code, au plus exempt de scrupules, qui matera ou apprivoisera l’opinion. Les contre-sens font rage, les sophismes se déchaînent, et le dilettantisme s’en rit, qui ruine définitivement les bases d’un idéalisme craqué de toutes parts, en dépit des quelques Parnassiens, ciseleurs de rimes d’or, âmes égarées, voix perdues ; — tant qu’enfin passe le détroit et franchit glorieusement nos murs la détestable erreur, fille bâtarde d’une géniale doctrine, produite au grand jour par des ignorants ou des scélérats, et
- ↑ J.-J. Weiss, Le Théâtre et les Mœurs, p. 167.