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LE THÉATRE D’HIER.

talent qu’il faut pour faire le grand reportage, la colonne financière, ou la gazette des tribunaux, et qu’à son âge on n’est plus si « gourmand »…

Mais la question d’argent n’a pas vieilli. Mais haute en couleurs, et brossée en pleine pâte est la peinture qu’en a faite Émile Augier. Il y a dépensé son observation vigoureuse, son robuste talent, sa rude et opiniâtre honnêteté, qui atteint par endroits à la prescience. Non qu’il ait goûté un plaisir amer à pousser la satire ou forcer le trait. Il n’y a là-dessous ni envie ni rancune. Quand il a rencontré l’occasion de montrer les services que peut rendre la fortune charitable et irréprochable, il ne l’a pas manquée. Dans Lions et Renards, c’est une jeune fille enthousiaste des grandes œuvres, qui met sa bourse à la disposition d’un explorateur ; et ici même, dans les Effrontés, c’est le marquis d’Auberive qui, séparé de sa femme, lui apporte les cent mille francs dont l’a dépouillée le pirate, et comble la brèche sans phrases. Seulement, ce sont les gens de vieille richesse qui, dans ce théâtre, se servent de l’argent pour faire le bien. Et nous n’avons pas encore vu tout le mal que font les autres à nos mœurs et à nos esprits.


VI

LA CONTAGION.


« Doucement, maître Roblot ! dit Jean de Thommeray. Le magicien, ce n’est pas vous, c’est Paris ! C’est la fournaise où tout flambe à la fois, le cerveau, le cœur et les sens, où les préjugés fondent comme cire, où l’esprit pétille, où l’argent ruisselle, où le plaisir dé-