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INFLUENCES ANGLAISES.

Bocage ou un Mélingue accompli. « Son front sombre et surnaturel est couvert d’un noir capuchon. L’éclair que lance parfois son regard farouche n’exprime que le souvenir d’un temps qui n’est plus ; quelque changeant et vague que soit son regard, il effraye souvent celui qui ose l’observer. On y reconnaît ce charme qui ne peut se définir et dont l’ascendant est irrésistible[1]. » Voilà l’homme fatal : et c’est bien lui, son regard, et son attitude, à l’écart, dans un salon mondain, qui a bouleversé l’imagination et les sens d’Adèle. En voici un autre encore plus fatal, exotique, et moderne. Il est selon Devéria, ou Devéria selon lui. «… Conrad n’avait rien qu’on pût admirer dans ses traits, quoique son sourcil noir protégeât un œil de feu ; robuste, sa force n était pas comparable à celle d’Hercule, et il y avait loin de sa taille commune à la stature d’un géant ; mais, sur le tout, celui qui le regardait plus attentivement distinguait en lui ce quelque chose qui échappe aux regards de la foule, ce quelque chose qui fait regarder encore et excite la surprise sans qu’on puisse s’expliquer pourquoi. Le soleil avait bruni ses joues ; son front large et pâle était ombragé par les boucles nombreuses de ses cheveux noirs. Le mouvement de ses lèvres révélait des pensées d’orgueil qu’il avait peine à contenir… Le froncement de ses sourcils, les couleurs changeantes de son visage causaient un indéfinissable embarras à ceux qui l’approchaient, comme si cette âme sombre renfermait quelque terreur et des sentiments inexplicables… Il y avait dans son dédain le sourire d’un démon qui suscitait à la fois des émotions de rage et de crainte ; et là où s’adressait le geste farouche de sa colère, l’espérance s’évanouissait, et la pitié fuyait en

  1. Le Giaour, p. 63, col. 1. Traduction Pichot. Paris, Ed. Ledentu. 1838.