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L’HOMME ET SON ÉPOQUE.

aussi de l’état d’esprit qu’elle dénote. Un souffle de révolte anime l’œuvre de Schiller et transporte Dumas ; les violentes passions, les situations fortes séduisent ce jeune athlète lâché à travers les littératures ; son imagination surtout trouve un délice en cette figure énigmatique et noble de Fiesque et dans les accents de poésie grandiose ou réaliste qui s’en échappent. Mais il a l’instinct du théâtre, à un point qu’il lui tient lieu de goût ; et il est français, malgré les assauts qu’il va donner à la tradition : il a le sens de la composition, du ramassé, de la progression dramatique ; il adoucit les éclats shakespeariens de Schiller, il en tempère la brutalité ; et sagement il se préoccupe du spectateur, qui porte les révolutions à la condition d’être porté par elles, et sans l’ardente complicité de qui les œuvres du meilleur poète meurent sur la scène et s’en vont prendre rang dans le musée de la littérature. Avec sa chaleur de tête, sa fougue, et sa vigueur, tranchons le mot, il semble déjà un révolutionnaire adroit. Et enfin, s’il n’a fait imprimer ni représenter « Fiesque de Lavagna », nous verrons bientôt qu’il n’a perdu ni son temps ni sa peine en le traduisant.