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L’HOMME ET SON ÉPOQUE.

cipal. Dans le premier acte interminable de Schiller il taille, coupe, rogne, met Fiesque au premier plan ; il fait la lumière sur ce rôle double, aussitôt après la première entrevue avec Verrina (I, x) :

 
Républicain austère,
Rien ne peut donc fléchir ton âpre caractère ?

Tu ne saurais plier sous mes efforts constans ;
Tu pars,… trompé comme eux… tu pars, il était temps !…
Va… tu t’es su choisir le moins pénible rôle ;
Il est bien fatigant d’être toujours frivole[1].

Fiesque insiste sur l’énergie qu’il lui faut dépenser en cette patriotique tromperie, et sur la vertu nécessaire pour jouer ce personnage :

À subir le mépris contraindre son courage,
De son luxe tenir tout un peuple occupé,
S’exposer à mourir sans l’avoir détrompé[2]

Pour nous édifier entièrement sur l’apparente équivoque du caractère, Dumas coupe le premier acte après la scène ix de Schiller, celle où le nègre tente d’assassiner Fiesque au profit du Gianettino (devenu Horatio), neveu de Doria. Il rejette tout le reste, le viol de Bertha, la colère de Verrina à l’acte II ; ainsi, Fiesque occupe le centre de la scène ; la perspective s’établit sur le théâtre, et le protagoniste nous est d’abord révélé en sa sympathique duplicité. Et pour finir cet acte I, selon la formule romantique (cf. Henri III ; Hernani), l’ambitieux déclame, sans plus attendre, en une sorte d’extase ou d’élévation, le monologue que Schiller avait placé beaucoup plus loin (III, ii.) J’en cite quelques vers d’un large mouvement et d’une libre imitation :

  1. Manuscrit inédit de Fiesque de Lavagna, I, sc. x.
  2. Manuscrit inédit, I, sc. x.