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LE DRAME D’ALEXANDRE DUMAS.

génération qui suit celle de Richard, prêchera en exemple le souvenir de ses débuts : « Un jour, un matelot, gros et grand gaillard, à qui j’ordonnais de descendre une barrique, hausse les épaules… Je sautai sur lui, et en six coups de poing je lui démolis la figure ; il obéit à l’instant même ; tout l’équipage commença à me traiter avec bienveillance, et j’acquis ainsi mes premières idées sur la façon de conduire les hommes[1]. » C’est le même qui dit : « On ne vit qu’en s’incorporant à quelque être plus grand que soi-même ; il faut appartenir à une famille, à une société[2] … » Telle est proprement la maxime de Richard. Égoïste par ambition, presque naïvement, je veux dire avec l’intrépidité d’une société jeune, qui depuis quarante ans a vu des choses étranges. Député, il fait ses discours, son opposition, sa réputation, sa fortune. Il a un homme, à lui, qui circule dans les pas-perdus, et qui n’a d’autre mission sur la terre que de prendre langue avec la presse, chauffer l’enthousiasme, préparer les transactions, et voir venir les gens et les choses. Ce factotum, parent du nègre de Fiesque, est le maître Jacques du politicien. Il règle la maison avec économie, se charge de détruire les papiers compromettants, ménage les entrevues utiles… Je m’arrête au seuil de la société contemporaine. Qui donc prétend que Richard Darlington est vieux comme un burgrave ? Qu’importe, après cela, que la bigamie soit un cas pendable, et que les desseins de Richard échouent dans les aventures de Rocambole ? Qu’importe Mawbray, cousin de Polder ou le Bourreau d’Amsterdam, si mistress Grey, qui n’est pas sans ressemblance avec la mère de l’auteur, a déjà quelques traits de madame Guérin ; si

  1. H. Taine, Vie et Opinions de M. Frédéric-Thomas Graindorge. L’auteur au public, p. 15.
  2. Ibid. Préface, p. ix.