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ANTONY.

« Oh ! non, non, tu es toujours mon Antony, mon amour. Que veux-tu, voyons ? Ne suis-je pas à toi ? As-tu même besoin de me consulter ? Me voilà, faible, sans force contre le malheur, sans défense contre toi. Prends-moi, emporte-moi, entraîne-moi[1]. » Au moment d’être entraînée, emportée, prise, elle reconnaissait « la chambre de sa fille ». Elle trouvait de touchantes paroles… [« Tu ne peux plus qu’une chose pour moi], mon Antony, fuir. Laisse-moi seule. [Tu me (te) perds ici sans me sauver.] Dieu aura peut-être pitié de moi. Il m’offrira peut-être quelque moyen de salut. Mais Dieu m’abandonnera s’il nous voit ensemble ; car être ensemble est encore un crime[2] … »

Elle était plus chrétienne aussi ; et je dois noter qu’Antony ne lui disait pas : « Satan en rirait, tu es folle… Non, non, tu es à moi comme l’homme est au malheur[3]. » Dumas s’était contenté, au moment où le colonel heurtait, de refaire la scène de la « porte » d’Henri III[4] Et cela se terminait primitivement ainsi :

« …Au nom du ciel, à tes genoux, va-t’en ! (Se relevant tout à coup avec effroi)… Silence… on ouvre… on entre… Malheur ! Grâce, mon Dieu, grâce ! Oh ! ne va pas à cette fenêtre, on peut te voir… sors… Il est temps encore. Ou cache-toi… ici… Oh ! non, c’est la chambre

    ne te manqueront pas ? Tu auras tout perdu pour moi, et qu’auras-tu en échange ? Une femme sans nom que tu mépriseras du jour où tu cesseras de l’aimer. » — « Ô blasphème ! » — « Car, vois-tu, je ne serai pas belle longtemps. La douleur creusera mes joues, mes pleurs brûleront mes yeux »… Dumas, toujours avisé, a ramassé ce dernier trait, qui est la femme même, et l’a replacé dans la brochure (I, sc. IV, p. 168). « Dans ta pensée, j’étais belle…, etc. »

  1. Manuscrit original, V, p. 42.
  2. Manuscrit original, V, p. 44. Les phrases entre crochets sont celles que Dumas a repiquées dans la brochure.
  3. Antony, V, sc. III, p. 224.
  4. Henri III, V, sc. II, pp. 195 sqq.