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LE DRAME D’ALEXANDRE DUMAS.

et très laborieux, au jour le jour. Son désordre a imposé à son génie de rudes labeurs et de pitoyables corvées, qu’il accomplissait le sourire sur les lèvres. Il a été la plupart du temps un terrible improvisateur, avec jovialité, toujours dispos. Il s’est plu aux pires besognes ; il s’est beaucoup amusé en de meilleures. Cette allégresse continue de la production, qui est peut-être la seule unité qu’il ait mise dans sa vie, en eût fait déjà un favori de la foule. Joignez-y d’incessantes et retentissantes frasques : c’était de quoi former une légende autour de son nom. Dumas a eu sa légende, sa légende à lui, à lui tout seul, comme son théâtre, son château de Monte-Cristo, sa poudrière de Soissons : et sa copieuse jactance, et sa truculente imagination en ont exulté. Il voyageait pour la propager ; il eût fait le coup de poing pour la rétablir. Le moyen qu’un pareil homme ne fût pas populaire ?

Il n’entra pas à l’Académie ; cette consécration lui manqua, si elle est nécessaire ; il ne l’eut point, si elle n’était pas indispensable à sa renommée. Non, certes, qu’il s’y soit aisément résigné. Il ne dit pas tout à fait ce qu’il pense, quand il l’affirme[1]. Il brûla plus d’une fois d’un vif désir d’en être. Enfin, il n’en fut point. Mais il fut de tous les théâtres de drame, qu’il fournit de matière pendant quarante ans. Quarante années

  1. Voir Histoire de mes bêtes, ch. i, p. 3. Cf. Ch. Glinel, op. cit., ch. v, pp. 363, 372, 389. M. Glinel a soigneusement noté les différentes tentatives de candidature : après Mademoiselle de Belle-Isle, lettre à Buloz : « Parlez donc de moi dans la Revue, pour l’Académie et demandez-vous à vous-même comment il se fait que je ne sois pas sur les rangs, quand A… (Ancelot ?) se présente » ; lettre à Ch. Nodier, janvier 1841, et au baron Taylor en 1842 — ces deux dernières inédites sont entre les mains de M. Glinel ; — et enfin en 1843, lettre au Siècle, après la mort de Casimir Delavigne. Cf. Début du Discours académique d’Alexandre Dumas fils.