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DRAME POPULAIRE DE CAPE ET D’ÉPÉE.

lution et de l’Empire ; il dit l’ivresse de l’individualisme triomphant. Que ne dit-il point ? Qu’importe, après cela, que ce benêt de Gaultier se laisse dérober ces tablettes accusatrices à lui remises, dans une scène artificielle et compliquée ? La reine n’est pas de force à lutter avec le capitaine. Et vivent les hommes d’énergie ! Buridan triomphe.

Il est vaincu. C’est le troisième acte. Buridan arrête Marigny, et Gaultier Buridan. Ainsi passent les puissances. Le tableau est spirituel ; mais surtout il nous plaît par un respect notable de l’autorité, qui est, comme chacun sait, la caractéristique de l’esprit français. Marigny, le premier ministre, sera pendu : c’est une douceur. Et Buridan est enfermé au Châtelet[1], lié et couché sur la paille d’un cachot, où l’on accède par deux cent vingt marches et douze portes qu’il a comptées, en souvenir du républicain Verrina[2]. Son prestige est fort compromis. Mais il le relèvera. Il le faut. On a trop bien su éveiller en sa faveur nos instincts indépendants. Cet aventurier a de la poigne et du sens. Il y joint, à l’égard des femmes, une philosophie expérimentale, qui n’est pas sans valeur ; si ces femmes sont reines, cette philosophie nous devient tout à fait savoureuse. L’épingle, les tablettes ont échoué. Mais Buridan a la boîte, la boîte enfouie dans sa chambre sous la septième dalle à partir du crucifix[3], une boîte de lettres écrites jadis à certain Lyonnet de Bournonville par une certaine Marguerite. Or ceci est l’acte de la prison, qui, outre la psychologie féminine qu’il révèle, est un des plus jolis tours de théâtre, et tout à fait dans le sens des

  1. La Tour de Nesle, acte III, tabl. vi, deuxième tableau du III.
  2. La Tour de Nesle, III, tabl. vi, sc. i, p. 54. Cf. la Conjuration de Fiesqne à Gênes, III, sc. i, p. 281.
  3. La Tour de Nesle, III, tabl. vi, sc. ii, p. 57.