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DRAMES HISTORIQUES.

titres : colonel de cavalerie, écuyer de Monsieur, chevalier de l’ordre de Cincinnatus, aide de camp de Washington à seize ans[1], etc., etc. Il ne fut rien de tout cela ; son nom n’existe même pas dans les contrôles. Et pourtant il lit partie des chevaliers du poignard ; le 20 juin 1792, il était au nombre des amis de choix massés autour du Dauphin et de la reine, « Il resta près de moi, dit Marie-Antoinette, dans la chambre où je me tenais, tout le temps que j’y demeurai moi-même[2]. » Il se faufilait dans l’entourage du roi ; il s’imposait à lui par ses rodomontades. N’avait-il pas émis le projet de se présenter devant l’Assemblée, roulant un tonneau décoré de rubans tricolores et rempli en apparence de monnaie de billon, et de faire sauter le Manège[3] ? Sa vie de Conspirateur n’est que puffisme et prestigiditation. Arrêté pour ses impostures, il recouvre la liberté « très miraculeusement[4] ». Il parvient à forcer l’accès de la Conciergerie, à voir la Reine, à lui remettre un billet dans un œillet. Il se vante de l’avoir vue une seconde fois. Le complot découvert, Rougeville a disparu. Le jour de l’exécution du roi, il avait lancé dans Paris une brochure vengeresse, signée de son nom. À cette heure, sa tête est mise à prix, il se cache pendant plusieurs semaines dans les carrières de plâtre de Montmartre, d’où il s’échappe à la nuit tombante, pour aller aux nouvelles et distribuer un second pamphlet qu’il intitule audacieusement : Les crimes des Parisiens envers leur reine, par l’auteur des œillets présentés à la reine dans sa prison[5]. Il conte même qu’il

  1. Lenôtre, op. cit., ch. ii, pp. 30 sqq.
  2. Ibid., ch. iii, p. 59.
  3. Ibid., ch. iii, p. 46.
  4. Ibid., ch. iv, p. 83 : « très miraculeusement et par des particularités étonnantes ».
  5. Ibid., ch. vi, p. 147.