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LE DRAME D’ALEXANDRE DUMAS.

il en est encore à demander : «Tout est-il prêt ?» Et il semble qu’il ait trop raison quand il dit :

Va, mes desseins sont grands autant que mesurés[1].

Le moment même de la crise que Voltaire choisit est un indice. Cicéron est consul ; le salut de Rome est en jeu ; les soldats de Catilina vont s’emparer de Préneste[2]. L’auteur ne s’embarrasse ni des préliminaires, ni des élections. Il est fidèle aux procédés de la tragédie. César gagne une bataille juste dans le temps que se débitent les répliques du milieu de la scène iii du Ve acte. Cet acte, à vrai dire, n’est qu’une fenêtre ouverte sur l’avenir de Cicéron et l’ingratitude des démocraties : de fait, l’action, si action il y a, s’arrête avec le IVe. En sorte que c’est par ce qu’ils disent et non par ce qu’ils font que ces Romains raniment l’histoire.

Les seuls personnages qui agissent sont de fantaisie pure. Aurélie, qui se tue en plein sénat comme les Girondins de Dumas devant le Tribunal de la Terreur, n’apparut pas d’abord telle aux yeux de Voltaire. Entre 1750 et 1752 il s’est ravisé, selon son habitude. La première figure était douce et tendre, destinée à mademoiselle Gaussin ; celle-ci est plus énergique, en l’honneur de mademoiselle Clairon. Elle joint l’action aux paroles ; elle fait le personnage d’une Lucrèce, au lieu qu’elle fit, au dire de Salluste, tout le contraire. Catilina veut sauver le fils qu’il a d’elle, tandis que les historiens nous affirment qu’il était soupçonné d’avoir tué son fils d’un premier lit peur épouser cette femme[3].

  1. Rome sauvée, III, sc. ii, p. 237.
  2. Rome sauvée, I, sc. ii, p. 214.

    Mes soldats, en son nom, vont surprendre Préneste.

  3. Œuvres de Salluste, Panckoucke, t. II, Conjuration de Catilina, ch. xv, p. 26 : « … pro certo credilur, necato filio, vacuam domum scelestis nuptiis fecisse ».