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DRAMES HISTORIQUES.

Voltaire risque timidement la vérité du spectacle. Il ne se restreint plus à la peinture des caractères, et pour cause. L’action du drame, il n’ose ; la psychologie, il ne peut. Il peint les mœurs par la parole ; il insinue et commente les textes historiques eu des discours. Si César et Catilina se rencontrent et s’adressent des tirades tout imprégnées des livres anciens, Voltaire estime que la scène fera plaisir à tout le monde et la dénomme « un tableau fidèle » de l’histoire romaine[1]. Ce tumulte des mœurs et des ambitions se traduit au théâtre par un assaut de sermons. Voyez-les paraître, Cicéron, Caton, Catilina : ils en ont tous un à placer. Il suffit que les mots consacrés y figurent pour que la scène soit historique et l’histoire scénique ! « Ne me faites point de procès, écrit l’auteur à d’Argental à propos de la scène vii de l’acte I. C’est précisément ce que Cicéron a dit de son vivant[2]. » Il est vrai que, de son vivant, Cicéron a prononcé ces paroles en plein sénat, et non pas en tête à tête ni au tournant d’une galerie, et qu’ainsi reprise* et commentées, elles perdent bien un peu de leur caractère vrai.

En des conjonctures où les historiens rapportent que de part et d’autre les hommes d’action ne se ménageaient point, les propos sont « forcenés », plus que les complots[3]. Même Catilina montre quelque lenteur, qui n’est pas sans effet sur la pièce. Au IIIe acte (sc. i)

  1. Rome sauvée, II, sc. iii, p. 230. Voir n. 1. « Comptez, écrit Voltaire à d’Argental, que la scène de César et de Catilina fera plaisir à tout le monde… Soyez sûr que tous ceux qui ont un peu de teinture de l’histoire romaine ne seront pas fâchés d’en avoir un tableau fidèle. »
  2. Rome sauvée, II, sc. vii, p. 223, n. 1.
  3. Rome sauvée, III, sc.ii, p. 239.

    Vous pensez que mes yeux timides, consternés,
    Respecteront toujours vos complots forcenés.