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DRAMES TRAGIQUES.

encore d’agir, et que hantent les grands desseins, est tout mouvement, tout péripéties, tout action et effort de l’individu déchaîné plus encore que libre ; la passion même y est singulière, tyrannique, et toujours un peu frénétique, ou du moins affecte de l’être ; elle s’impose, s’affranchit, s’évertue, trop impatiente, et de qualité intellectuelle trop médiocre pour se complaire aux délices ou aux profondeurs de l’analyse. Et Dumas, comme tous les romantiques d’ailleurs, mais lui surtout, qui est plus dramatiste, ne voit point le contresens de mêler ceci à cela. Il en sent du moins la difficulté dans l’exécution. Qu’importent unités, règles, conventions, vaines étiquettes à l’usage des révolutions de préfaces ? C’est à l’œuvre qu’on voit l’erreur de l’ouvrier. On peut briser moules et barrières ; on ne supprime pas l’essence même des choses ; on ne confond pas impunément tragédie et drame.

Christine est une œuvre écolière, ainsi que Cromwell, avec des scènes qui promettent autre chose que Cromwell et Christine. Elle abonde en imitations, mais non pas sensiblement plus qu’Henri III. Le style poétique est inégal, et l’auteur en a reconnu l’insuffisance, peut-être avec excès[1]. Il trahit plus d’embarras que de faiblesse, pauvre par la syntaxe, mais non par la faculté d’expression. Ce n’est pas l’écrivain qui fait tort à Christine. Déjà il possède l’allure, le pittoresque, la sensibilité, et un certain don d’objectiver les sensations. Il n’est d’ailleurs plus à son coup d’essai, ayant publié nombre de vers en des recueils aujourd’hui oubliés[2], et traduit Fiesque de Lavagna. La phrase poétique est parfois incorrecte ; elle sera toujours un peu raide et fruste entre ses mains. Il a plus

  1. Mes mémoires, t. VI, ch. cxxxvi, p. 24.
  2. Voir Charles Glinel, op. cit., passim. Celui de ces recueils auquel il donna le plus de vers était la Psyché.