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LE DRAME NATIONAL ET « HENRI III ».

Désormais, tous les événements vont pousser Saint-Mégrin vers le guet-apens : l’entrevue et la prédiction de Ruggieri, la duchesse chez l’astronome, le duc qui trouve le mouchoir de la duchesse. Puis, Saint-Mégrin est triste et rêveur ; il délie son ennemi, qui est le mari. Puis, c’est la jalousie du duc, la scène du billet et du gantelet, le guet-apens préparé. L’homme qui meurtrit une main de femme n’est pas pour s’arrêter à mi-chemin de la vengeance. Saint-Mégrin reçoit la lettre et la clef, qui le convient au rendez-vous. On se souvient qu’ici Dumas imite Schiller. La scène est empruntée ; même les expressions les plus fortes s’y retrouvent. Comparez et appréciez ce qu’il en fait, comme il nous met en l’esprit cette conviction que Saint-Mégrin doit affronter le rendez-vous, et la défiance céder à l’amour. Ce sont tour à tour la crainte, la compassion, les questions pressées, la lettre lue à haute voix, dont nous avons entendu la dictée alors que nous voyions le bras de la duchesse broyé, et c’est le meurtre de Saint-Mégrin inévitable. Oui, tout se trouve dans Schiller ; il n’y manque que le mouvement, les préparations, l’ordonnance dramatique. Cependant le nom de Dugast retentit à nos oreilles, tel un glas, comme au deuxième, comme au premier acte. Et le quatrième se termine au bruit de l’orage et dans une appréhension vague de la mort. Le but est atteint ; la scène terrible et douloureuse, la scène invraisemblable, qui est le terme de l’émotion et de l’action, est devenue nécessaire. Nous l’attendons avec tremblement ; nous l’écoutons dans l’angoisse. Ne voilà-t-il pas le drame ?

De trouver et déterminer les situations, c’est beaucoup. Mais il faut faire les scènes. Le dramaturge se reconnaît à ce qu’il en exprime tout ce qu’elles contiennent, sans tout dire, dans une progression naturelle, où le dénoûment n’est en aucun cas perdu de vue. Il