titué dans sa forme presque définitive. En ce sens, Dumas a pu en résumer la formule : « En fait d’art dramatique, tout est dans la préparation[1] ». Seulement, la préparation est continue, jalonnée d’acte en acte, et de scène en scène, au lieu que toutes les « semences » de la pièce soient contenues dans l’exposition. L’armature de l’œuvre implexe est ainsi plus flexible et articulée. On comprend qu’elle soit nécessaire à un théâtre où les mœurs et les événements occupent une place prépondérante[2].
Il s’agit d’amener Saint-Mégrin à la scène finale du rendez-vous, où il trouve la mort. Notez que, pour être historique ou à peu près, elle n’en est pas moins invraisemblable. Si c’était un mignon sans cervelle, passe ; mais Dumas en a dû faire l’adversaire de Guise, le vaillant conseiller du roi : un danger pour les projets ambitieux de Catherine, un modèle de jeune et fervente tendresse amoureuse. Eh quoi, Saint-Mégrin, qui se souvient de Dugast, qui peut s’attendre à toutes les embûches, s’en va, sur la foi d’un billet, comme un bon étourdi, à l’hôtel de Guise, de nuit, confondu parmi les Ligueurs ? La difficulté est manifeste, mais la catastrophe et la suprême émotion sont à ce prix. Or voyez l’art et le travail du dramaturge, d’un vrai, celui-là. J’ai dit que Catherine manœuvre ces ambitions et ces passions. Et l’on accordera que cela n’est point mal vu.
Il faut tout tenter et faire
Pour son ennemi défaire[3].
- ↑ Histoire de mes bêtes, ch. i, p. 3.
- ↑ Beaumarchais avait utilisé le jeu des accessoires, qui sont comme les signes matériels de ces préparations dans le drame comme dans le vaudeville : clefs, lettres, toques, cicatrices, etc. Il va sans dire que Beaumarchais les avait empruntés de l’espagnol, et Corneille aussi.
- ↑ I, sc. i, p. 123.