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INFLUENCES ALLEMANDES.

de texte, il est malaisé de la vérifier[1]. Mais il cite plus loin un document irréfutable, qui montre que, lorsque Dumas n’allait pas au théâtre allemand, c’est le théâtre allemand qui venait à lui. Sur la lettre d’un sieur Max de Goret, qui lui envoyait la traduction d’un premier acte de Kotzebue, Dumas écrit à plusieurs mois d’intervalle : « Aux conditions que j’ai dites à Thibaudeau, je ferai de ce manuscrit une pièce pour les débuts de Bocage, pourvu qu’on me prévienne quinze jours d’avance[2] ».

Tant de réminiscences et d’imitations, sans compter les souvenirs d’Anquetil, des chroniqueurs, mémorialistes, nouvellistes, à commencer par L’Estoile pour finir à Mérimée, ne pouvaient passer longtemps inaperçues. Le 1er novembre 1833, Granier de Cassagnac écrivait un article au Journal des Débats, où il dénonçait l’heureuse fécondité de Dumas. Il relevait, pour chacune des pièces jusqu’à la Tour de Nesle, le détail des plagiats dont elle s’était enrichie. Il s’intéressait beaucoup plus, et avec une ironie perfide, au nombre des scènes empruntées qu’aux auteurs de qui Dumas les prenait. Il avait fait le compte ; Christine en contenait dix qui n’étaient point de Dumas. Il y ajoutait d’ailleurs, en adroit journaliste qui connaît la corde

  1. Ch. Glinel, op. cit., ch. vi, p. 445.
  2. Ibid., ch. vi, p. 485. Voici la lettre de Max de Goret : « Monsieur Dumas, voici le premier acte de la traduction de Kotzebue. Je n’ai pu en faire d’avantage. Demain matin je crois j’aurais fini l’ouvrage entier. — Si vous avez le temps jettez un coup d’oeil sur la dernière scène — il me semble qu’on pourrait en faire une scène à grand effet. « Toujours votre obligé pour la vie,
    « MAX DE GORET. »

    Mardi, 15 mars matin.

    P.-S. — « Comme j’ai écrit très vite, pardonnez quelques fautes d’orthographe, je vous prie. » Dumas n’en était pas à cela près.