Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/76

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
64
ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

dans l’escalier ? Honte et sang, d’abord ; plus tard, le Code décidera de ces passions superbes. Beaumarchais, dans la Mère coupable, n’osant pas faire reparaître Chérubin, consignait l’adultère sur le seuil de la famille. Dumas le loge, aujourd’hui, dans une auberge. Mais demain hôtels et palais lui seront ouverts. Et voleront en éclats les vitres des vastes baies architecturales, où le soleil levant mire ses rayons d’or. Et ce sera, pour chaque vitre brisée, un beau scandale dans le monde en même temps qu’un excellent sujet de pièce.

Antony, drame passionnel, est enlevé avec une admirable vigueur et se précipite d’un mouvement incroyable vers la conclusion logique. On conçoit qu’il ait effrayé les acteurs et fait explosion dans le public. Énergie, imagination, orgueil, ambition, sensualité, fureur d’amour et rage de possession, le protagoniste exprime tout cela, les bras croisés, les mains tendues, les poings fermés, les genoux brisés, les lèvres ouvertes comme pour prendre un baiser ou saisir une proie, tout cela tour à tour, avec une force irrésistible. Mais ainsi ressentie, plutôt que comprise, la pièce d’Alexandre Dumas est incomplète. Antony, ressassant en prose les bouillons de l’âme et les désirs de la chair, « rabâchait », au dire de l’acteur Firmin. Même le dénouement, comme l’a noté Dumas, se réduirait aux simples proportions d’un fait divers de la Gazette des Tribunaux ou d’une tuerie à la façon du Théâtre de Clara Gazul, si les derniers mots perdaient, au détriment de l’ensemble, leur exacte portée : « Elle me résistait ; je l’ai assassinée ! » Ce serait encore un