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ver un cri de surprise et à ne pas me trouver en tout point d’accord avec les récits de bien des voyageurs, car j’en distingue trois catégories bien différentes, qu’il importe de faire connaître pour l’intelligence de cet ouvrage.

La première, celle des savants, amis du progrès dont le but est d’étudier et de faire connaître. Quoi que le missionnaire ait en vue une fin encore plus élevée que celle-là, il ne trouve cependant pas indigne de son sublime ministère d’allier l’une à l’autre en associant dans un même élan de charité, l’amour de Dieu et celui de la Patrie.

Mais, il est une autre classe de voyageurs beaucoup plus nombreuse : c’est celle des spéculateurs attirés par l’appât de la fortune, soit vers la traite des pelleteries ou le commerce du bois. Cette classe parle peu, parcequ’elle a des secrets à taire, ou plutôt des intérêts à sauvegarder par le silence.

Mauvaise enseigne, par conséquent.

De cette seconde catégorie, en ressort une autre qui s’appelle légion : c’est celle des aventuriers, qui louent leurs bras et leurs épaules pour l’exploitation du bois ou le transport des marchandises, pelleteries, provisions, etc., etc…

Cette classe connait peu, et comme conséquence, parle beaucoup et fort mal.

À ces derniers, il ne faut pas s’adresser pour savoir s’il y a des montagnes, car ils vous répondront invariablement : « C’est un pays ben “rough”, Monsieur ;… c’est effrayant de ce que c’est “tough”, ce n’est rien que des rapides, des roches, des crans à se casser le cou ! »

Pauvres gens il faut les plaindre, mais ne prendre à la lettre que juste la moitié de ce qu’ils disent. Pour eux rien de plus naturel que de trouver le pays tout à rebours. Peu enclins à la science, encore moins à la poésie, sans cesse en lutte avec les éléments déchainés sous forme de vents, de courants ou de rapides ; les pieds endoloris aux