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reçues par les vagues elles sont rejetées sur les rives, battues, reprises et repoussées jusqu’à ce qu’elles s’amoncellent en levées compactes au-dessus de la houle qui les laisse alors dormir en paix.

Aussitôt, mille germes que l’élément vaseux tenait en suspens de développement sous la bienfaisante influence du soleil. Le foin aquatique, la folle avoine, le pois sauvage, le persil, la gentiane se disputent ce nouveau terrain où percent même déjà mille petites fleurettes fraîches et gentilles inconnues dans nos climats.

L’année suivante, vous y verrez poindre le groseiller, le génevrier et quelques timides pousses de saule, à l’abri desquelles mûrira la fraise odorante.

Remontez encore et vous aurez la prairie régulièrement constituée avec son fourrage long et serré ondulant sous le souffle de la brise.

Après avoir marché un mille ou deux dans ces prés émaillés d’une flore luxuriante qui, certes, ne manquerait pas d’attrait pour le botaniste, vous croyez entrer dans un verger : Ça et là, des touffes arrondies, tantôt seules, tantôt réunies en groupe de cinq ou de dix vous apparaissent de loin comme de magnifiques pommiers ; mais hélas ! ce ne sont que ce que Virgile appelait : «  salices amaras. »

Bientôt les arbustes se pressent, s’élèvent et le peuplier commence à montrer sa tête. Le mélèze lui fait cortège puis l’épinette aux crins piquants… nous voilà en pleine forêt.

De temps en temps, vous faites un détour pour éviter une lagune où les canards s’ébattent à travers les joncs ; mais d’où aussi s’élèvent des myriades de maringouins, aimables connaissances que l’on aimerait autant ne pas y rencontrer. N’importe ; si vous avez la précaution de vous enduire tous les endroits vulnérables d’une bonne couche de « Maringouinifuge », vous pouvez procéder en paix à votre tournée géologique.

Nous sommes dans une jeune